Optimisation photovoltaïque #2 : Principe et survol de la solution technique

Sommaire

Cet article fait partie d’une série de posts ayant pour objectif de rendre rentable l’utilisation de panneaux solaires photovoltaïque dans un contexte domestique. Pour bien comprendre ce dont il s’agit, il est recommandé de lire les articles dans l’ordre. En voici la liste :

Quelques notions élémentaires

Avant d’entrer dans le vif du sujet, il est utile d’avoir bien en tête quelques notions pour bien comprendre ce qui suit. Rassurez vous, rien d’exceptionnel !

L’électricité c’est comme l’eau ! On paye en fonction de la quantité consommée. Or la quantité dépend du débit et du temps, plus l’eau coule vite et longtemps, plus le volume utilisé est grand. Pour l’électricité c’est pareil mais simplement les unités sont différentes.

DébitQuantité
EauLitre par seconde (L/s)Litre (L)
ElectricitéWatt (W)Watt/heure (W/h)

En électricité, on utilise le mot “puissance” à la place de “débit” pour qualifier le flux d’électricité qui passe à l’instant. Par exemple une ampoule LED à une puissance d’environ 10W. C’est un tout petit débit en comparaison d’une petite plaque de cuisson qui transforme 1000W d’électricité en chaleur, ou bien d’un cumulus électrique dont la puissance est généralement de… 2400W.

Quel que soit le débit ou la puissance, ce qui nous est facturé au final c’est la quantité. Ainsi, un robinet qui goutte peut couter très cher à la fin de l’année : la petitesse du débit est compensée par la très longue durée d’utilisation. Il en est de même pour l’électricité : une ampoule de 10W allumée pendant 100 heures coute autant qu’une plaque de cuisson de 1000W pendant une heure. Pour calculer le volume, on multiplie simplement la puissance (le débit) par le temps d’utilisation.

Comme un watt c’est peu, on utilise le plus souvent des kilo watts (kW). Un kW c’est 1000W. Un kW pendant une heure = 1000W/h = 1kW/h (1000 watts utilisés pendant une heure, ou bien 100W utilisés pendant 10h, ou encore 200W pendant 5 heures).

Bon à savoir : la puissance en courant alternatif ne se mesure pas qu’en kW, mais aussi en kVA (kilo Volt Ampère). A ce stade, la distinction importe peu pour nous, les consommateurs particuliers. Laissons donc ceci de côté pour l’instant.

Principe détaillé

La nécessité d’un système de régulation

Dans l’article précédent nous avons vu que sans stockage, l’énergie photovoltaïque est sous exploitée, et qu’une façon très économique de stocker le surplus d’énergie est de produire de l’eau chaude.

En journée, ce que nous voudrions faire, c’est diriger en priorité l’énergie vers les appareils dont on ne peut pas différer l’utilisation (par exemple l’ordinateur, la télévision, les plaques de cuisson, le frigo, etc.). Toute l’énergie en surplus, s’il en reste, est ensuite envoyée vers le chauffe-eau et stockée dans un ballon. Qu’importe si ce dernier met plus de temps à chauffer, après tout il a la journée entière, voire plus, pour cela !

Le graphique ci-dessous présente ce qui se passe en fonction de la puissance fournie par les panneaux et celle utilisée par la maison.

Redirection du surplus d’énergie produite vers le chauffe-eau

L’objectif est de réduire la zone rouge (utilisation d’EDF) au minimum.

Par ailleurs, il faut permettre au système de recourir à EDF lorsque la production solaire n’est pas suffisante. Ceci peut arriver dans deux cas distincts:

  • Puissance insuffisante : à un instant t, la consommation de la maison dépasse la production solaire photovoltaïque. Soit il fait nuit, soit le ciel est nuageux, soit plusieurs équippements fonctionnent en même temps et dépassent les capacités de l’installation solaire. Par exemple une plaque de cuisson, un four et un aspirateur peuvent allègrement atteindre 5kW ensemble, c’est beaucoup plus qu’une installation PV légalement limitée à 3kW en autoconsommation, même en plein soleil.
  • L’énergie fournie par le soleil a été insuffisante pendant une longue période (2j ou plus), si bien que le ballon d’eau chaude ne contient plus que de l’eau… froide.

D’où la nécessité d’un système intelligent qui régule les flux d’énergie électrique. A tout moment le système analyse la quantité d’énergie produite par les panneaux solaires et l’énergie utilisée par la maison, puis fait en sorte que les deux s’équilibrent au mieux, en agissant sur la variable d’ajustement qu’est le chauffe-eau. De temps en temps, le système doit aussi décider d’apporter au cumulus de l’électricité depuis EDF en cas de temps nuageux durable.

Schéma de principe du système

Le schéma ci-dessus présente de manière simplifiée le réseau électrique d’une maison, avec une installation solaire connectée au réseau et un chauffe-eau électrique avec ballon. A ce système on ajoute les composants de régulation.

Dans ce réseau on ajoute deux points de mesure : la mesure de la puissance fournie par les panneaux solaires (notée “Ps“) et la mesure de la puissance totale utilisée par la maison (notée “Pm“). Grace à ces deux valeurs on va pouvoir déterminer par soustraction l’énergie à envoyer dans le chauffe-eau (notée “Pce“).On ajoute aussi un mécanisme de contrôle de la puissance. Ce dispositif va permettre de piloter avec précision la puissance utilisée par le chauffe-eau entre 0% et 100%.

Enfin on ajoute un système de régulation connecté aux 3 éléments décrits ci-dessus. Il reçoit les valeurs de mesure électrique, et agit sur le contrôleur de puissance du chauffe-eau. Le travail du régulateur est d’équilibrer au mieux “Ps” et “Pm“, en faisant varier “Pce“.

Prenons un exemple. Au démarrage, Ps=1000W, Pm=200W et le chauffe eau est éteint (Pce=0W). On dispose donc de 800W pour le chauffe-eau : le régulateur pilote le contrôleur de puissance à 800W. La valeur de Pm va ainsi monter à 1000W et s’équilibrer avec Ps. Un peu plus tard un ordinateur est allumé et utilise 100W : la valeur de Pm augmente elle aussi de 100W pour atteindre 1100W. Le régulateur constate que Pm est supérieure à Ps et décide donc de descendre Pce à 700W pour compenser. Pm repasse donc à 1000W. Un peu plus tard un nuage passe et fais chuter PS à 400W : cette fois c’est 600W de trop qui sont utilisés (PmPS = 1000-400 = 600). Automatiquement le régulateur ôte 600W de Pce pour rétablir l’équilibre. Enfin la nuit tombe, Ps=0, le régulateur ne peut rien faire de plus que de piloter Pce à 0. On tire alors le courant d’EDF avec une puissance de Pm. Et ainsi de suite…

Bon j’espère ne pas vous avoir perdu avec ces calculs ! Heureusement calculer c’est le travail du régulateur, pas le notre.

Présentation des composants mis en œuvre

Mes recherches d’une solution clef en main sont restées vaines. Il existe peu de produits commerciaux sur le marché, ceux ci sont soit introuvables, soit proposé à un prix inabordable.

Petit à petit je me suis donc dirigé vers un système sur mesure basé sur des composants unitaires peu couteux. Voici une présentation succincte du matériel utilisé, on y reviendra très en détails dans les articles suivants.

  • mesure de puissance : module PZEM-004t. Il s’agit d’une petite carte électronique bien adaptée pour la mesure de puissance en courant alternatif 220V. Elle se pilote par liaison série et fournit puissance, tension et compteur d’énergie. On la trouve vendue avec une pince ampéremetrique entre 6€ et 10€. Il nous en faudra 2. A savoir : si un compteur Linky est installé chez vous, il est possible de récupérer les puissances instantanées soutirées et injectées via la sortie TIC. Dans ce cas, on peut procéder autrement (j’exposerai peut être ça dans un autre article).
  • contrôle de puissance : j’ai choisi ce variateur de puissance en particulier car il est piloté numériquement. C’est un gros avantage car on peut espérer un contrôle précis, fiable, en temps réel et sans panne. En outre ce gradateur SCR est donné pour une puissance de 10kW, très au dessus des 2.4kW du chauffe eau. Coût: moins de 10€.
  • régulation : c’est la tête pensante du système, il nous faut un ordinateur. J’ai choisi un Raspberry PI 3 sur lequel tourne un programme Python. C’est très commode pour expérimenter et ajuster la boucle de régulation mais nous verrons que l’on peut déporter cette fonction ailleurs et se passer de ce composant.
  • communication : mes équippements (tableaux électriques, raccordement réseau, système de régulation) sont éloignés les uns des autres. Plutôt que de tirer des cables, j’ai opté pour le WiFi. A cette fin j’utilise l’ESP8266, une petite merveille à moins de 2€. Il nous en faut 3 : le premier lit les valeurs du module PZEM-004t pour la puissance solaire, le deuxième lit les valeurs du second module PZEM-004t pour la puissance utilisée par la maison, et le troisième pilote le SCR. J’ai choisi MQTT pour la diffusion des informations sur le réseau WiFi.
  • alimentation : les modules ESP8266 nécessitent une alimentation qu’on obtient avec ces convertisseurs HLK-PM003 : environ 2€ pièce. Il nous en faut un par ESP8266, c’est à dire 3.
Architecture technique

Il vous faudra aussi un fer à souder, de l’étain, un peu de fil électrique, des gaines thermorétractables pour isoler correctement les connexions, un ordinateur… Bref du petit matériel de bricolage. Il vous faudra aussi un peu de courage mais vous en avez forcément puisque vous avez su lire ma prose jusqu’ici.

Article suivant : Contrôle numérique du variateur de puissance

Add a Comment

Your email address will not be published. Required fields are marked *