Optimisation photovoltaïque #7 : Conclusion, et pour aller plus loin

Sommaire

Cet article fait partie d’une série de posts ayant pour objectif de rendre rentable l’utilisation de panneaux solaires photovoltaïque dans un contexte domestique. Pour bien comprendre ce dont il s’agit, il est recommandé de lire les articles dans l’ordre. En voici la liste :

Retour d’expérience

Pour rendre compte du fonctionnement du système, rien de mieux que quelques chiffres et graphiques. Voici ceux de ma maison.

D’abord les chiffres brut. Pour rappel il s’agit dans mon cas de l’énergie électrique utilisée par ma maison (2 adultes, 2 enfants) pour les besoins usuels et le chauffage de l’eau sanitaire. Le chauffage de la maison est, pour l’instant, au bois. J’ai choisi les mois de Novembre 2018 et Mars 2019 car ils ont un profil de consommation tout à fait typique.

  • Puissance crête installée : 1500W
  • Coût tout compris : 1500€
  • Mise en service des panneaux : 19 Janvier 2019
  • Mise en service du système de régulation : 15 Février 2019
  • Consommation EDF Novembre 2018 (avant installation) : 257kW/h
  • Consommation EDF Mars 2019 (après installation) : 132kW/h

La différence entre Novembre et Mars est importante : presque 50%. Ceci étant, un ensoleillement généreux en Mars explique en partie ces chiffres. Vous trouverez ci-dessous les graphiques de consommation détaillés pour ces deux mois.

Consommation 11/2018, jour par jour avant installation solaire.

Sur ce graphique on constate qu’une part importante de l’énergie est consommée pendant les heures creuses (notés HC) et correspond au chauffage de l’eau. Les heures pleines sont notées HP. La consommation quotidienne totale est assez stable et reste autour de 8 ou 9kW/h.

Consommation 03/2019, jour par jour après installation solaire.

Sur ce deuxième graphique apparaissent les relevés de production photovoltaïque (notés PV). On y remarque très vite la deuxième moitié du mois très ensoleillée pendant laquelle la production PV est de 7 à 8kW/h par jour. Durant cette période il n’a pas été nécessaire de recourir à EDF pour chauffer l’eau. La consommation en heures pleines s’en trouve aussi réduite de moitié.

La première moitié de Mars est plus variable mais la consommation quotidienne est néanmoins diminuée de façon bien visible. Lors des périodes pauvres en ensoleillement, l’eau a été chauffée en HP. En effet j’ai choisi de forcer le chauffe-eau en milieu de journée lorsque la production avait été insuffisante sur les deux jours précédents, l’objectif étant d’avoir de l’eau chaude le soir. Un effet positif inattendu est d’ailleurs apparu : en réchauffant l’eau au dernier moment, on économise les pertes thermiques. En effet, chauffer la nuit pour l’utiliser le soir suppose que le ballon perd un peu d’énergie du fait d’une isolation imparfaite. Energie qui se révéle être non négligeable, de l’ordre de 2kW/h par jour, soit environ… 100€ par an !

Au vu de ce deuxième relevé, on s’aperçoit aussi que l’abonnement HC/HP ne se justifie plus, mais le gain est marginal (estimé à environ 15€/an).

Difficile pour l’instant de quantifier exactement le gain réel. J’attend une année pleine pour débattre des chiffres et déterminer avec précision le temps de retour sur investissement. Je l’estime actuellement compris entre 5 et 7 ans. Verdict dans un futur post… mais c’est bien parti !

Trucs et astuces

Pour profiter au mieux du stockage du surplus d’énergie photovoltaïque dans l’eau chaude, voici quelques pistes supplémentaires.

  • En premier lieu, isolez votre ballon d’eau chaude. L’isolation intégrée est généralement très insuffisante à un point où ça en devient presque scandaleux.
  • Augmentez la température de consigne du ballon d’eau chaude : d’ordinaire la température est d’environ 55°. On peut choisir de porter la consigne à 60°, ce qui permettra de stocker un peu plus d’énergie, et donc d’avoir une plus grande autonomie. Prudence toutefois, car le risque d’entartrage augmente avec la température. Mieux vaut utiliser cette option si l’eau n’est pas dure.
  • Si vous utilisez un lave vaisselle, il peut être intéressant de le brancher sur l’arrivée d’eau chaude, à condition d’avoir une tuyauterie courte. Autrement l’eau qui arrive dans le lave vaisselle n’est plus chaude car refroidie entre temps dans la conduite. Non seulement il va falloir la réchauffer à nouveau mais en plus de l’énergie est extraite inutilement du ballon pour chauffer les tuyaux…
  • Si vous avez des batteries avec une capacité importante à charger (vélo, voiture), il est intéressant de les intégrer dans la régulation au moyen d’une prise commandée. Voire avec des modules basiques tels que celui-ci. Le principe est très proche. Je le met d’ailleurs en œuvre pour charger mon vélo électrique (0.75kW/h) au moyen du programme de régulation présenté à l’article précédent.
  • Veillez à “lisser votre consommation”. En d’autre termes, éviter les pics de consommation en essayant de faire fonctionner les gros appareils électroménagers consécutivement, et non en même temps. Ceci est indépendant du stockage d’énergie dans l’eau chaude mais reste une règle d’or dans le cadre de l’auto-consommation. C’est une habitude parfois un peu difficile à prendre mais qui peut se révéler payante.

Points faibles et pistes d’amélioration

Le SCR

Je n’ai pas trouvé mieux que le SCR (voir l’article correspondant) et pourtant il présente un défaut important, celui de déformer l’onde et d’engendrer des parasites. Il se peut que certains équipements ne réagissent pas bien à ce phénomène.

Pourtant, il existe des alternatives. On a évoqué le variac, certes plus homogène mais onéreux et mécanique, mais j’aimerais évoquer une autre solution intéressante. Au lieu de faire varier la puissance d’entrée, on peut faire varier la puissance absorbée. Ceci peut se faire en combinant plusieurs résistances chauffantes dont les puissances sont étagées progressivement. En les activant individuellement (à l’aide d’un relai) on peut définir plusieurs puissances cibles. Par exemple avec 4 résistances de 100W, 200W, 400W et 800W on peut obtenir toutes les valeurs entre 0W et 1500W par pas de 100W (4 bits: 16 valeurs). Certes on perd un peu en précision mais ça reste acceptable. Le circuit est complètement résistif, par contre il requiert une modification du chauffe-eau et du ballon. Le coût n’est pas négligeable non plus (4 résistances et 4 circuits de contrôle). Peut être intéressant sur une nouvelle installation donc.

Réactivité moyenne du système

A présent la mesure est fournie par un module PZEM-004t (voir l’article correspondant). Cet outil est pratique et précis mais la fréquence de mesure est plutôt basse, environ 0.25Hz (une mesure toute les 4s). Comme la boucle de régulation nécessite deux points de mesures dont l’acquisition est probablement désynchronisée, c’est potentiellement jusqu’à 8 secondes de décalage entre la variation physique réelle et l’obtention des valeurs.

C’est en général satisfaisant, sauf dans un cas assez particulier mais récurrent : celui des appareils de cuisson (plaque de cuisson, four micro-ondes, four classique, etc.). Typiquement ces équippements travaillent par à coup. Ils chauffent d’abord à pleine puissance et en continu jusqu’à atteindre la température souhaitée, puis ils s’activent répétitivement pour maintenir la chaleur désirée, mais toujours en tout ou rien (soit éteint, soit puissance maximum). Un hachage un peu à la manière du SCR finalement. Le problème lors de cette phase “intermittente” est que les moments de consommation ne sont généralement pas synchronisés avec les prises de mesure et le programme de régulation ne peut pas piloter efficacement le chauffe-eau. Par exemple, si une plaque de cuisson est utilisée pour faire mijoter un plat et fonctionne 3s, puis s’arrête 7s, alors le temps de réaction de la boucle de régulation est trop élevé : on peut soit mesurer un pic de consommation et suspendre le chauffe-eau pendant trop longtemps (et donc ne pas profiter de l’énergie PV), soit mesurer une absence de consommation et mettre en route le chauffe-eau en parallèle des plaques de cuisson. On arrive donc dans une situation où l’on a à la fois beaucoup de surconsommation et sous-consommation. C’est très inefficace d’autant plus que pour mijoter un bon ragout il faut bien compter une heure ou deux…

Pour remédier à ce problème il faudrait soit augmenter fortement le temps de réaction de la boucle de régulation et réaliser des moyennes (mais ça nous amène seulement à sous-consommer), soit au contraire le diminuer fortement (en dessous d’une seconde). C’est probablement faisable à l’aide d’un circuit sur mesure, et moyennant une petite perte de précision peut être. Je n’ai pas creusé le sujet pour l’instant.

Robustesse et autonomie de la boucle de régulation

Comme je l’ai mise en place actuellement, toute l’intelligence se trouve sur un composant externe (un Raspberry Pi). Si cette architecture est idéale pour monitorer le fonctionnement du système, puis l’adapter rapidement et facilement, il n’en reste pas moins que plus on multiplie les composants, plus la complexité et le risque de panne augmentent. En bref c’est très bien pour prototyper mais c’est aussi plus délicat à déployer et à maintenir.

La présence d’un Raspberry Pi (ou autre) n’est pourtant pas une nécessité absolue. Pour rendre le système plus autonome et compact, on peut profiter des capacités de l’ESP8266 à fonctionner en mode WiFi station (client) ET point d’accès. Ainsi il est tout à fait envisageable de convertir le programme de régulation Python en C++, le faire fonctionner sur le module de contrôle du SCR qui fonctionnerait en mode point d’accès WiFi, et sur lequel les modules de mesure viendraient se connecter. Tout le système serait alors auto suffisant. Solution à développer !

Inefficacité inhérente à une installation individuelle

On sait que nombre de procédés gagnent à être mis en œuvre au niveau industriel, pas à titre particulier. En voyant grand on réalise des économies d’échelle. Ce raisonnement s’applique sans réserve à la production d’énergie. Inutile de se le cacher : une installation individuelle avec tous les coûts cachés et pertes de rendement qu’elle engendre est loin d’être idéale. Tenter d’optimiser l’utilisation de sa propre énergie est bien moins efficace que de gérer globalement une resource commune.

En particulier, lorsqu’on aborde le thème du chauffage (dont celui de l’eau, mais pas seulement) alors il est regrettable de constater le si faible déploiement d’installations solaires thermiques à grande échelle, pourtant si efficaces et bien maitrisées depuis des décennies.

J’estime personnellement que la juste réponse aux problèmes énergétiques à venir ne se situe pas au niveau local et encore moins résidentiel. Pour autant il faut bien commencer quelque part non ?

Conclusion

On a vu rapidement quels sont les avantages et inconvénients du solaire photovoltaïque. C’est une énergie polyvalente et facile à mettre en œuvre mais l’intermittence de sa production la rend peu adaptée à nos besoins. Stocker l’énergie est une nécessité pour améliorer la situation.

J’ai aussi présenté une solution technique qui consiste à stocker le surplus d’énergie dans un ballon d’eau chaude et un système de régulation “intelligent” qui détecte et redirige en permanence la surproduction vers le chauffe-eau. Ainsi on optimise la production solaire : ce qui n’est pas consommé tout de suite est stocké pour plus tard. En tant que telle, la solution proposée n’est pas d’un produit clé en main mais plutôt un ensemble de briques simples qu’on pourra recombiner et adapter. Chaque installation a ses spécificités !

A ce jour je suis très satisfait de l’efficacité du système, même s’il reste des améliorations possibles et que je manque encore de recul. quoiqu’il en soit tout ceci doit impérativement s’inscrire dans un groupe d’actions plus large, telles que moins consommer et adapter ses habitudes.

Si ces articles vous ont inspirés n’hésitez pas à me contacter, je serais très heureux de discuter à ce sujet !

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